(s)ugar, (h)oney, (i)ce& (t)ea.

((un.)) un texan et une portoricaine. c’est d’là que c’est partie, que ton histoire débute. c’était des gamins à l’époque, lui, fils d’un riche homme d’affaire, un peu rêveur qui voyage et qui tombe en amour pour cette île où il s’installe contre l’avis d’ses parents. il l’a rencontre elle, avec son mode de vie dans la moyenne. un couple qui se forme et qui finira par se marier, pour ensuite, accueillir un an plus tard leur premier enfant. s’en suivra deux autres, dont toi. toi, cadette de cette famille soudée avec laquelle t’es encore proche aujourd’hui.
((deux.)) t’as toujours été une enfant un peu téméraire, à explorer beaucoup trop d’choses. tu étais le genre à disparaître lors des éternels dîner familiaux pour allez t’amuser avec le chien d’la cousine qui devait rester dehors, le genre à constamment salir ta petite robe blanche en tentant de grimper aux arbres ou à revenir, les genoux écorchés contre le sol bétonné, tes cheveux dans tout les sens et ton petit air faussement coupable au visage. ta mère ne calcule plus le nombre de paires de chaussures que tu as abimé, ce qui serait un vrai blasphème pour toi aujourd’hui, vu ton amour pour les chaussures.
((trois.)) ton anglais est un peu chantant, quelques intonations espagnols se faisant parfois entendre, surtout quand tu t’énerves. ça s’explique parce que t’as grandit avec les deux langues, passant de l’une à l’autre comme ces deux langues dominent sur ton île des caraïbes. pour pas perdre cette culture, ta mère a passé presque toute ton enfance à te parler en espagnol, comme pour s’assurer que tu te souviendrais d’où tu venais, pour assurer tes origines. tu as d’ailleurs pris la mauvaise habitude de jurer en espagnol, ce qui est finalement un avantage, évitant ainsi à ta fille de répéter les mots qui peuvent parfois sortir de ta bouche.
((quatre.)) t’avais cinq ans quand vous avez quitté san juan pour finalement rejoindre le continent principal. c’est donc à dallas que vous vous êtes installés, vous rapprochant ainsi de ta famille paternelle permettant à ton père de ressouder les liens avec celle-ci et te permettant ainsi de faire la connaissance de tes grands parents paternels. depuis, vous en avez fait des allez-retour au porto rico et autant dire que tu attendais les vacances avec impatience pour pouvoir t’amuser sur les plages de ta ville natale.
((cinq.)) t’as grandit dans des bonnes conditions, tes parents n’étant pas trop stricte et te permettant ainsi d’évoluer comme toi tu le désirais, te découvrant au fil des années. tes grands parents, eux, avaient tendance à te mettre un peu plus de pression, ce qui t’auras poussé à t’éloigner autant que possible des normes d’une société un peu trop stricte à ton goût. très vite, tu t’es révolté devant les injustices du monde, principalement celles touchant les minorités. dés le lycée, tu t’es engagée dans des causes, t’impliquant dans la vie de celui-ci pour modifier les pensées qui sont encore aujourd’hui beaucoup trop stricte à ton goût. c’est d’ailleurs à cette époque que t’as rejoins le journal de ton établissement, justement pour dénoncer c’qui se passait dans les couloirs du bâtiment. c’est là, que ton amour pour l’écriture et le journalisme est arrivé, c’est là, qu’t’as su ce que tu voulais faire : changer les choses par tes articles.
((six.)) septembre 1968. tu as soufflé ta dix-huitième bougie dans l’année et te voila, récupérant ton diplôme de fin d’année. le lycée c’est derrière toi, alors t’embarques tes affaires, ton vieux doudou qu’tu mets dans un carton dans le coffre de ta coccinelle verte et te voila en route pour une autre ville, un autre état. tu traverses presque la totalité du pays, allant du sud vers le nord, atterrissant ainsi à Minneapolis, ville du Minnesota, parée à faire ton entrée à l’université. parce que tu voulais prendre ton envol, tu voulais vivre seule, indépendamment, loin de la pression de la famille paternelle. alors t’as postulé partout et tes résultats t’ont ouvert l’accès à plusieurs université. seulement, ton choix c’est fait sur minneapolis, parce que c’est le programme qui t’intéressait le plus, faisant atterri celle-ci au sommet de ta liste.
((sept.)) tu t’y installes, tu vis ta meilleure des vies comme jeune étudiante. tu t’investies dans la vie autour du toi, tu parles pour défendre tes convictions, tu rêves de changer les choses, d’un monde meilleur et pour ça, tu t’accroches à tes convictions qui sont les éternelles raisons de ta présence dans ce cursus universitaire. t’es bien, tu tombes en amour pour cette ville. tu sais pas si tu y passeras toute ta vie, mais de toute évidence, tout te plais ici, principalement les mentalités qui sont tout de même un peu moins guindés qu’au texas.
((huit.)) te voilà, après cinq ans au sein de l'université, fraichement diplômé et tu trouves rapidement un emploi au sein du journal local. tu commences doucement, pas trop prise au sérieux pour ton statut de femme, apportant plus les cafés qu'autre chose et postant le courrier. rare, sont celles qui tiennent en voyant leur rêve de journaliste écrasés par cette société qui veux qu'au final, vous n'êtes soi-disant pas bonne à grand chose. au final, tu t'es accroché, assez pour proposer un essaie qui a su satisfaire le rédacteur en chef et peu à peu, tu t'es mises à couvrir des évènements, écrire des articles. rêve accomplis, te voila journaliste, mais la route est encore longue, tu l'sais. mais au moins, tu peux écrire, dénoncer à travers tes articles.
((neuf.)) tu le rencontres lui. carter. tu tombes sous son charmes, tu peux pas expliquer comment ou pourquoi, juste, c’est comme ça. c’est allez vite, peut-être un peu trop vite, au point que quand il pose le genoux à terre et qu’tu dis oui, même tes parents, pourtant laxistes, ont un peu tiqués. sauf que tu pouvais pas faire autrement, dans ta tête, c’était lui, the one, malgré vos dix ans d’différences. dans ta tête, avec lui, t’allais la vivre, ta putain de belle histoire et tu avais le schéma de tes parents en tête, te disant que vous aussi, après tant de temps vous seriez toujours ensemble et amoureux, que vous auriez votre belle histoire, et que vous deviendrez vieux ensemble. t’as pas vraiment laissé le choix à ta famille, de toute manière, en partant, t’as arrêté de devoir rendre des comptes.
((dix.)) elle commence bien cette histoire, un peu trop bien même. tu touches presque les étoiles constamment, presque comme si tu descendais jamais de cette période paradisiaque que traverses tout les couples. t’es encore plus comblée d’bonheur quand elle née elle, votre fille, ta fille. t’es gaga, peut-être un peu trop, tu deviens même ce parent insupportable à lui parler comme si t’étais une demeurée, constamment à t’émerveiller pour le moindre de ses mouvements. tu t’es calmé avec le temps, mais t’es toujours complètement folle d’elle. tu pourrais passer des heures à l’habiller, la coiffer, dormir contre elle. t’es prête à tout pour elle, au pire, comme au meilleur.
((onze.)) tu t’es finalement trouvé un peu stupide quand tu t’es retrouvé devant le fait accomplit. ton petit coeur qui se brisait tandis que tu réalisais que t’avais été trop conne pour croire que ouais, votre histoire avec carter elle serait parfaite. ça arrive qu’aux autres, c’est le genre d’histoire qui se trouve dans les livres que tu lis ou à tes copines femmes au foyers qui s’occupent que de leur gosse et qui n’ont plus le temps de se préoccuper d’autre chose. t’as pourtant été vigilante, tu t’es pas trop abandonnée à ton rôle de mère, t’as tenté d’rester cette femme que t’étais avant. tu sais pas c’que t’as fait pour mériter ça, mais c’que tu sais, c’est que t’étais prête à l’faire. à partir, loin. pour allez où ? tu sais pas toi même, sans doute que tu serais retourner à Dallas chez tes parents, avec la compagnie de ta fille. c’est tout c’qu’il méritait et pourtant, il a su trouver les mots et tes resté. Et t’as rien dit. Pourtant, comment refaire confiance quand ta propre confiance à été autant piétiné ? Avec le temps, la confiance, elle est revenue. Pourtant, t’es plus aveuglé par celle-ci. T’as su pardonner, au point que tu balanceras jamais cet argument lors d’une dispute, mais t’as pas oublier. C’est gravé au fer rouge dans ta mémoire.
((douze.)) la nuit du douze mai dernier était juste un anniversaire de mariage comme les autres. une soirée en tête à tête, le genre qui faisais battre ton petit coeur comme à chaque fois. le genre qui te rends heureuse, qui t’rappelle pourquoi t’es tombée amoureuse de carter. puis elle était belle, cette pluie d’météorite. c’était anodin, presque, du moins, c’est c’que tu pensais. jusqu’à ce que tu sois atteinte d’une grosse fièvre et d’autres symptômes pas spécialement agréable à vivre, te poussant à rester au lit pendant plusieurs jours. tu pensais que ta vie retrouverait un semblant de normal quand enfin, t’étais prête à reprendre ta vie, sauf qu’encore une fois, c’était ta naïveté qui parlait. mais comment t’aurais pu le savoir ? te douter, ne serait-ce qu’une seule seconde que tu serais parmi les victimes de ce virus, qu’au final, toi, simple petite journaliste de Minneapolis, tu te retrouverais avec des aptitudes tirées tout droit des romans les plus extravagants que t’adore lire. et pourtant, t’es devant le fait accomplit.
((treize.)) la peur saisissant tes tripes, cette boule au ventre constamment présente, cette sensation de devoir faire constamment attention à c’que tu fait. tu sais plus quoi faire, t’es totalement perdue erin et tu sais que la moindre faute pourrait te couter beaucoup, à toi, mais surtout à ta famille. t’es telle une bombe à retardement erin, si tu t’énerves, tu sais qu’les conséquences peuvent être catastrophique, c’est dangereux, pour toi, mais surtout pour ta famille et c’est ce qui t’inquiète. tu t’en voudrais, tu pourrais jamais te pardonner si il leur arrivait quelque chose par ta faute. tu t’sens en plus opprimé et cette sensation n’a fait que devenir encore plus présente depuis que carter n’est plus au conseil municipal. alors tu fait attention autant qu’tu le peux. t’as pu passer au travers des mailles du filet pour l’instant, tu sais même pas comment t’as fait, mais tu t’réjouis d’être en mesure de pouvoir rentrer chez toi tout les soirs. tu t’fais discrète, et t’essaies de refouler cette aptitude au maximum : mais plus tu renies celle-ci, plus elle se manifeste. dans tout les cas, tu restes vigilante, tu rases les murs. c’est pas dans ta nature, mais tu peux pas t’permettre d’attirer le doute sur toi. alors tu restes discrète, le plus possible.
((quatorze.)) y a un peu d’joie dans ton malheur. parce que t’es enceinte erin, pour la seconde fois et autant dire que ça, ça t’réjouis et te réchauffe le coeur. toi, t’as adoré être enceinte alors t’es beaucoup trop heureuse de pouvoir réitérer l’expérience. t’as déjà des rêves plein la tête, t’imagines un petit gars ou une autre petite fille. tu sais pas, tout c’que tu sais c’est que t’es joviale. t’essaie juste de pas penser au fait que d’après les estimations, c’est depuis la nuit du douze mai, nuit de ton dixième anniversaire de mariage. nuit où ta vie à toi à basculer, où la vie de beaucoup trop d’gens on basculer. alors t’appréhende, tu veux pas qu’ce gamin vive avec cette même peur qui te prends au tripe et surtout, tu veux pas qu’il lui arrive quoi que ça soit. tu sais pas, tu sais plus. de toute manière t’es largué, tu perds pieds, alors t’attends et tu espères, qu’il sera un simple petit humain, qu’il n’ait pas à porter le fardeau que toi, tu dois porter.