Café mocha vodka valium

Tu piques une tête dans l'alcool tous les weekends, plus rarement en semaine. Y'à parfois plus de whisky que de sang dans tes veines, c'est comme si t'essayais de rattraper d'un coup toutes les fêtes auxquelles tu as pas participé quand t'étais plus jeune ; tu te rends compte que tu t'es pas assez amusé, trop obsédé que tu étais par l'envie de réussir. Un jour t'as décidé d'y remédier, tu rattrapes le temps perdu comme si tu pouvais le trouver au fond d'une bouteille de Dictador. La seule chose que tu vois pourtant dans les reflets ambrés de tes excès, c'est l'ombre de tes mensonges. L'alcool te rend plus violent, moins prévenant, tu te mets à prendre des décisions sur des coups de tête alors que tu sais que tu les regretteras le lendemain. Pas toutes, cependant ; pas à chaque fois, puisque tu ne peux pas culpabiliser sur celles dont tu te souviens pas // Parfois tu souffres d'insomnies, et y'à des médicaments qui s'entassent dans ton armoire à pharmacie. Parfois tu les prends, parfois pas. Parfois tu préfères les choses un peu moins légales. Tout est à portée de main, à présent que tu en as les moyens financiers - t'as juste à tendre le bras pour prendre ce qui te fait envie. Tu es un ado à qui on a donné une carte bleue, tu es boulimique, tu es incapable de te contenir. T'as manqué de tout quand t'étais jeune, maintenant tu manques de rien et t'es incapable de gérer. Alors tu fais tout, d'un coup, trop fort. Si tu veux une voiture, tu prendras la plus cher, si tu veux une montre, tu prendras la plus brillante, si tu veux de la drogue, tu prendras la plus forte. Aucun entre-deux, aucune demie-mesure, t'as été balancé d'un extrême à l'autre et maintenant t'as plus qu'à aller te faire vomir dans les toilettes pour expulser le surplus // T'as toujours méprisé les gosses de riches que tu fréquentais à l'université, parce qu'ils te regardaient de haut sous prétexte que tu étais boursier. T'as appris à faire le caméléon, au lieu de rejeter leurs mœurs tu les as adopté. T'as jamais voulu devenir comme eux, et pourtant c'est ce que tu as fait. Tu es devenu prétentieux, manipulateur, t'as rejeté tes valeurs pour embrasser les leurs, parce que dans le fond, tu voulais tellement faire parti de leur monde. Depuis toujours. Ils te crachaient dessus et toi tu les jalousais. Traîne avec des millionnaires, t'as des chances d'attraper des millions, traîne avec des pouilleux, t'as des chances d'attraper des poux. T'as fréquenté les dîners mondains, tu répondais plus aux invitations de tes parents, t'as loupé tous les repas de thanksgiving avec eux juste parce que tu supportais pas qu'on te rappelle d'où tu venais - ta mère a eu un cancer, t'étais même pas au courant. A Columbia, tu t'es même inscrit pour devenir parrain d'un de ces connards, même si tu estimais ne rien avoir à lui apporter, tu voulais juste un bon point supplémentaire dans ton dossier. T'as bossé comme un fou furieux par soif de reconnaissance sans te rendre compte que ceux que tu idolâtrais ne t'en donneraient jamais. C'est pas grave, au final tu as réussi, même si tu continues de penser que t'as toujours un truc à prouver. T'es resté coincé dans le moule que tu t'es toi-même forgé, t'as presque oublié tout ça maintenant, le masque que tu t'es acharné à porter c'est devenu toi, ou peut-être que ça l'a toujours été ? // Control freak, t'as toujours vu ta vie comme une longue liste d'étapes à cocher pour être validé par la société. Aujourd'hui ta liste elle est vide, alors tu te sens paumé, tu sais plus dans quelle direction avancer. T'étais satisfait au début d'en être enfin libéré, mais tu t'es libéré de rien Nils, parce que tout est devenu une prison. Tu rêvais d'être riche et reconnu par tes pairs, tu t'emmerdes tellement dans ton train-train quotidien que tu te sens obligé de faire n'importe quoi à côté pour compenser, tout plutôt que de penser, tout plutôt que de te dire que la vie que tu as ne te convient pas, toi qui a bossé si durement pour l'obtenir, ça serait tellement con que tu aies pas fait les bons choix. Tu te barricades derrière des sarcasmes et une attitude de connard mais la réalité te gifle dès que tu ouvres les yeux dans ton lit vide, et tu supportes de moins en moins de voir défiler dans ton bureau des gens dont tu te fous, parce que t'es pas altruiste, et que tu hais ce que tu es devenu. La satisfaction que tu aurais du avoir, tu ne la trouves pas, pourtant tu es persuadé qu'un jour peut-être, elle viendra ? Finalement, tes fantasmes une fois assouvis ne t'apportent rien, tu n'es pas heureux, mais tu ne l'avoueras pas, t'as encore trop de fierté personnelle en toi. T'as une vie parfaite, t'as tout coché, c'est bien, prends ta médaille. Et maintenant ? Maintenant il ne te reste plus qu'à tout détruire. Vous avez cassé toute la vaisselle avec ta femme à force de vous disputer. T'en as racheté, t'as plus qu'à tout casser à nouveau. Tu regardes en arrière et tu décortiques tout malgré toi, parfois tu as un éclair de lucidité que tu te dépêches d'étouffer. Il s'agirait pas de te rendre compte que tu t'es trompé... Tu as envie de rester du bon côté du bureau, c'est toi le thérapeute, pas le patient. // Tu t'es jamais laissé le temps d'avoir des passions, trop exigeant avec les autres et avec toi même, t'as toujours reporté ça au lendemain en te disant que quand tu aurais fini, tu prendrais le temps de respirer. Tu t'es asphyxié pendant des années ; si tu te rencontrais toi même, tu te trouverais probablement ennuyant. Tu adores la lecture pourtant, tu as repris ça il y a peu de temps, tu vas flâner dans des librairies sans trop savoir ce que tu y cherches, tu te plonges dans des récits fantastiques, ça te parait enfantin, tu fais semblant de les acheter pour ton cousin, mais t'as pas de cousin. Tu achètes en parallèle des tas de livres sur la psychologie, tu te renseignes sur les dernières avancées dans ton domaine, pour te tenir à la page, pour être toujours plus performant. T'aimes bien aussi aller danser, même si tu danses mal. Tu as beau te perdre dans les endroits trop bruyants, y'à bien des jours où tu vas juste au parc pour t’asseoir sur un banc, t'es né à la campagne et t'as besoin de voir des arbres, de sentir de l'herbe. Tu te sens déconnecté, quelquefois, perdu depuis trop longtemps dans les rues des villes aux pavés que tu trouves sales, t'aimerais bien retourner vivre à Caroll, dans l'Iowa, tu sais pourtant que c'est pas comme ça qui te soignera // Ta femme s'est barrée avec le chien, c'est pas plus mal, toi tu voulais un chat. Alors t'en as adopté un dans un refuge du coin, tu l’amènes au bureau avec toi, ça calme les patients, ou ça te calme toi ? Il parait qu'avoir un animal c'est bon pour le coeur, t'es vraiment con au point de commencer à croire les dictons de grand mère sur l'allongement de la durée de vie, tu es comme tout le monde, tu as peur de vieillir toi aussi. Mais t'as pas pris un chat pour ça. Ce n'est qu'une autre de tes envies impulsives, si ça se trouve un jour tu décideras de le refourguer là d'où il vient. Non... Tu ferais pas ça... Tu aimes bien qu'il vienne ronronner sur tes genoux, même s'il fout des poils partout et que ça t'horripile, tu passes ta vie à nettoyer tes fringues, tu es un peu maniaque. D'ailleurs, tu t'es rendu compte que tu éternuais plus souvent que d'ordinaire quand il était pas loin de toi. Serais-tu allergique ? // A une époque, tu jouais au golf, tu étais un cliché ambulant. T'as arrêté quand t'as compris que tu arriverais jamais à saisir la différence entre un albatros et un birdie. Tu as ragé longtemps face à l'échec, et puis t'es passé à autre chose. Tu t'es mis à la natation pendant que ta femme suait dans le salon devant Gym Tonic, tu te rappelles que parfois, tu t'amusais à le faire avec elle et vous redécouvriez alors une certaine complicité. Maintenant qu'elle est partie tu allumes plus la télé et tu vas de moins en moins nager, même si ça reste un des rares plaisirs que tu te gardes encore. Tu te retrouves dans un appartement trop grand pour toi parce qu'il était fait pour deux, tu tournes en rond, te te rends compte que les pièces résonnent du trop plein de vide qu'il y a à l'intérieur de toi. Les soirées que tu te fais te bouffent trop d'énergie, tu comates dans ton canapé en attendant l'heure d'aller travailler. Et puis tu t'obliges à enchaîner. Tu n'en as, à vrai dire, plus grand chose à faire d'avoir l'air désirable, ou de désirer. Evidemment, tu t'habilles toujours correctement, ton apparence compte plus que le reste, tu continues de vouloir faire bonne impression, c'est le coeur de ton problème après tout. Mais y'à quand même des semaines où tu oublies de te couper la barbe, et quand tu t'en rends compte, tu te rases tellement à vif que tu t'en tires avec des coupures hideuses. Tout s'étiole autour de toi, même ta propre image. // Tu fais parti de ces idiots un peu conservateurs qui prônent le port d'armes, tu sais pourtant que la seule personne sur qui tu pourrais tirer, c'est toi-même. T'es d'autant plus serein avec l'idée depuis l'arrivée des mutants, même si tu sais pas encore de quel côté te positionner, avec eux. Pour le moment, ils t'ont rien fait, et tu estimes que c'est pas ton problème. T'as pas que ça à foutre, même si ta femme avait des opinions plus tranchés à ce sujet, qu'il t'est arrivé de partager, certains jours. Tu préfères faire ta vie et ignorer les incidents, peut-être que le temps te forcera à choisir un camp, qui sait ? Mais pas tout de suite, y réfléchir ça te donne mal au crâne. Trace ta route, tu t'évertues déjà à essayer de garder un minimum de contrôle sur ta vie avant de t'intéresser à la leurs // Tu es un expert en nœuds. Comme pour le reste de ta vie, tu t'es vite lassé des banalités pour t'intéresser aux choses plus subtiles, et ça même au lit. Tu as pris goût au bondage parce que tu aimes avoir le dessus, tu n'aimes tes partenaires que lorsqu'ils te tiennent tête, tu ne vois le sexe que comme un énième jeu de pouvoir, tu as loupé une marche, à ce niveau là aussi. Tu as besoin d'humilier, à ta façon, pour te sentir vivant, tu cherches partout l'adrénaline et l'excitation qui manque à ton quotidien, tu répètes le schéma, tu aimes briller par tes éclats en espérant vendre aux autres le même rêve qui t'a toi-même bercé. Tu voudrais pouvoir entraîner tout le monde dans ta chute, alors tu te défoules sur des filles que t'as payé pour ça. Contrôle illusoire pour perdre de vue le fait que tu n'en as plus aucun, tu devrais essayer de tout réapprendre, peut-être. A commencer par savoir lâcher prise quand y'a plus rien à quoi s'accrocher // Tu as donné ton premier baiser beaucoup plus tard que les autres, parce qu'à une époque tu étais beaucoup trop romantique, et puis c'était pas ta priorité. Tu avais des objectifs à respecter. Mais tu t'es laissé avoir par un professeur, quand t'es entré à l'université. Tu étais encore si naïf, tu l'as laissé te berner. T'as appris qu'il faisait le coup à beaucoup d'autres que toi et tu t'es convaincu que les hommes, c'était pas fait pour toi. Tu t'es tourné vers les courbes féminines jusqu'à ce que tu rencontres l'étudiante qui allait devenir ta femme. Tu ne l'aimais pas, tu as juste aimé qu'elle, elle t'aime. Tu avais besoin d'être le centre du monde de quelqu'un, mais tu ne l'as jamais laissé être le tien, tu étais trop aveuglé par ta suffisance. Il était certain qu'un jour, elle s'en rendrait compte. Tu l'as tellement blessé Nils, et tu ne t'en es jamais excusé... C'était un désastre prémédité. // Tu cuisines très bien, du moins ton niveau est un peu au dessus de la moyenne. Étrangement, c'est quelque chose que tu aimais faire. Chez toi, ta femme ne mettait pas les pieds dans la cuisine, c'était ton domaine. Tu aimes voir le visage se détendre à la première bouchée et les traits perdent toujours leur dureté lorsque le goût s'invite sur les langues. Tu penses qu'on peut déduire beaucoup de choses d'une personne à partir de son plat préféré.