c
chéri t'étais clairement le préféré de ta famille, et t'as l'habitude du confort sentimental. t'as l'habitude de l'amour, t'as été baigné dans l'amour. c'est un cocon, un cocon confortable. t'avais pas prévu de t'en éloigner, et cet amour, tu l'as cherche ailleurs maintenant. dans n'importe quoi, quoique tu trouves. t'as l'habitude de la chaleur humaine, de la chaleur sentimental.
a
absence t'es un être hyper sociable, t'aimes les gens, t'aimes le contact. devenir chien t'as rendu encore pire. tu gères mal les départs, tu gères mal les absences. quand t'étais petit, tu te demandais pourquoi le papa de seth c'était pas ton papa, mais t'osais pas en parler. alors tu t'inventais des histoires, tantôt il était soldat mort au combat, tantôt un vendeur de drogue. tu trouvais ça triste, tu trouvais ça injuste. et puis les pouvoirs sont arrivés, et puis ton demi-frère a disparu. comme ça. sans laisser de trace, sans laisser de mot. il aurait pu te laisser un mot, il aurait pu dire où il créchait. faut croire qu'il pensait pas tant à toi. tu te sens idiot alors t'es resté là, avec ta fièvre que tu cachais. et puis toi aussi t'étais mutant. et tu te souvenais des cris de ta mère, tu te souvenais des heures qu'elle passait à pleurer le soir, la nuit. les murs sont fins, difficile de s'endormir quand on entend sa mère pleurer toutes les larmes de son corps. alors t'as du fuir aussi, mais tu savais pas où, tu savais pas comment. de toute façon t'as jamais eu l'impression de savoir vraiment quelque chose.
N
neyla t'aurais pu crier haut et fort que c'était l'amour de ta vie neyla. elle était tellement belle, avec les plus beaux cheveux de la terre. dans ses yeux, t'aurais pu t'y noyer, elle te rendait si heureux. couple populaire du lycée, tu chantais ses louanges sous la douche. t'étais niais, t'étais amoureux. t'aurais pu créer une statue pour elle, t'aurais peut-être même pu avoir une passion pour elle. mais t'étais trop occuper à traîner dehors pour avoir l'air cool et juste... juste rien faire. c'est elle qui t'a poussé à travailler à l'école, même si le fait que tu y arrives beaucoup trop facilement l’énervait. tu l'aimais, tendrement, t'aurais voulu qu'elle soit ta reine. t'étais timide au début, incapable de l'aborder. et puis seth l'avait vu. il avait vu ton regard. alors il avait tout fait pour la draguer, pour l'emballer, pour l'avoir avant toi. étrangement, tu lui en veux presque pas car c'est ça qui t'avait obliger à sortir de ta zone de confort pour lui parler. et lui voler son cœur, avant seth.
mais neyla, c'est elle aussi qui est parti à harvard, le lycée terminé. c'est elle qui est partie avec ton cœur, qui a dit qu'elle ne t'oublierait jamais mais vous savez... les amours du lycée. depuis t'as moins envie d'aimer, depuis tu veux moins t'attacher. mais t'en sais rien. et puis c'est compliqué l'amour. et puis des problèmes, t'en as déjà bien assez.
i
idéal t'as pas eu d'idéal dans ta vie, t'as jamais eu vraiment d'objectif. t'étais là, dans ton bonheur, dans ton quotidien, dans ta simplicité. opportuniste, t'étais capable de sauter sur les bonnes occasions pour passer un bon moment. mais pas assez pour trouver un rêve, comme coincé dans une adolescence sans fin. t'as pas de métier que tu rêves de faire, t'as la flemme de chercher quelque chose, de tendre la main. t'étais bien dans ton confort, c'est dommage que c'était avant.
s
sport ta mère t'as toujours comparé à un petit singe sportif, à sauter dans tout les sens. si t'es feignant pour commencer de nouvelle chose ou utiliser ton cerveau, t'étais toujours partant pour faire le tour du quartier en courant. tu fais parti de ces gens qui sont toujours du côté des sportifs qui ont la vie facile. du volley, du basket, de l'athlétisme, t’enchaînais, tu passais par tout, curieux, amusé.
l
lui tu devais avoir 14 ans, tu devais traîner dans la rue pour faire le mec cool. alors que tu l'étais pas du tout. fils à maman, incapable de te débrouiller tout seul. les mains dans les poches, t'as vu ton demi-frère avec un de ses potes. et ça t'a fait quelque chose de bizarre dans le cœur. un peu la même chose que quand tu voyais une jolie dame dans la rue. t'avais refuser de l'admettre, c'est bizarre ce genre de chose. ça devait être une erreur, un problème biologique, rien de grave en somme. du coup le soir t'avais dit à seth que tu l'aimais pas du tout son pote, et qu'il était bizarre. mais impossible que tu aimes les garçons et les filles. non. c'est pas possible ce genre de chose.
u
ubac du côté lumineux de la montagne, tout est sympa. t'es un chien, tu peux te faufiler partout, quelque chose se passe dans ta vie. c'est marrant comme tu te rends compte maintenant que ta vie était d'un ennui mortel, et là, soudainement il se passe quelque chose. tu peux pas le nier, tu n'es plus ordinaire. mais du côté sombre de la montagne, t'as peur, t'es seul, recroquevillé dans les rues, affamé, se demandant si t'allais finir sur une table d'examen. avec la douleur. c'est pas si chouette.
p
prière tout les dimanches, vous alliez à l'église. pas le genre d'église déprimante, non non, le genre d'église ou on chante fort, le genre d'église où on frappe dans nos mains. tu sais pas s'il existe vraiment un dieu là haut, mais t'adores chanter. alors tu y allais en cachant ton sourire, coincé dans la voiture familiale. l'ambiance là bas était incroyable, et tout le monde était chaleureux. personne ne criait, tout le monde chantait. et on te pardonnait tes conneries, ainsi que celles de Seth que tu disais être les tiennes. mais depuis que Seth a disparu, ta mère applaudit moins fort. et depuis que t'as disparu, ta mère applaudit plus du tout.
u
univers c'est quelque chose qui t'effraie, qui te paralyse. l'univers, c'est grand, l'univers, c'est gigantesque. t'es rien au milieu, tu représentes quedal. t'es juste un mec au milieu, qui se balade d'un point à un autre. ça te donne presque envie de t'abandonner à ton côté bestial, ça va te perdre ellis. fais gaffe.
s
sale ta notion de propreté a changé, avant tu te disais qu'il fallait se doucher tout les jours. avant secrètement t'aimais les gel douche qui sentait la coco. maintenant t'as plus trop l'occasion de te doucher, il paraît que dans la rue, y'a pas une douche à chaque coin. surtout que tu te caches, pour pas que ta famille te retrouve. tu t'accroches à ça, à ne pas les décevoir. et t'as ce côté en toi qui a envie de se rouler dans la boue, qui a envie de fouiller les poubelles, de trouver le truc qui sent le plus fort. t'es devenu un vrai animal ellis.
f
famille t'aurais pu être l’aîné de la famille, t'aurais du être l’aîné de la famille. 6 gosses dans la maison, rien que ça, ta mère n'a pas chaumé. techniquement, t'es l'aîné et tu t'y accroches bêtement, parce que t'es encore un gosse dans ta tête. mais ta mère n'est pas venu les mains vides, elle avait déjà un fils, Seth et petit tu pensais que c'était ton vrai frère, 100 % ton frère. mais ton daron t'as vite fait comprendre le contraire. qu'il était qu'une moitié de frère, et qu'il valait moins que Hasan, Martin, Nelson et Delroy, tes petits frères. ils sont arrivés plus tard mais tu les aimes, et ils t'admirent. c'est dommage, car t'es pas brillant.
a
avant on était une grande famille bordélique avant. toujours du bruit, toujours des choses à faire. t'étais celui qui faisait rien de spécial, t'étais celui qui traînait sans objectif, celui qui avait essayé l'université mais qu'avait pas tenu un semestre. sans finalité précise, tu glandais rien là bas, tu te tournais les pouces. alors t'es parti, sans idée. tu te disais que tu trouverais bien un truc, un jour, une passion. n'importe quoi, mais quelque chose.
m
manger t'as toujours été le ventre à pattes de la famille, toujours à grailler quelque chose sans prendre un gramme. t'es un gouffre sans fin et on en rigolait le soir au dîné, en soulignant qu'il fallait mieux t'avoir en photo qu'en pension. maintenant plus que jamais, t'as faim, t'as très faim, t'as tout le temps faim. mais ta vie est compliquée, t'as plus de toit sur la tête, t'as plus ta famille qui te nourrit. t'es parti d'un coup, t'as pas réfléchi. tu dors dans ta rue, caché, pour pas qu'on te trouve. tu voles dés que tu peux, tu fouilles les poubelles. heureusement que cet homme passe de temps en temps t'apporter à manger. tu le surveilles lui, même si tu rêves doucement de repartir avec lui parfois.
i
ivoire et il se passe quoi derrière ta porte d’ivoire ellis ? tu penses à quoi ? comme tu détestes cette phrase. tu penses à rien ok ? tu fais bien ce que tu veux, tu penses à rien. penser ça te fait peur, penser c’est réfléchir, c’est se projeter dans l’avenir ou dans le passé. t’es pas du genre à t’accrocher au passé et t’aimes pas réfléchir au futur. sûrement finir dans un supermarché, vendeur, au mieux manageur ? t’aimerais faire du bien sur la planète mais t’as aucune compétence, et le corps humain t’y connais rien. alors tu fermes ta porte d’ivoire, tu fermes les yeux et t’ouvres les oreilles. il paraît que t’es un grand baratineur, il paraît que tu écoutes les gens très bien. tant que t’en sais plus que tu voudrais. sur les gens, sur ce qu’ils veulent. tu sais te faire discret parfois, si c’est pour se mettre quelque chose sous la dent.
l
lac t’avais 10 ans à peine et t’avais suivi seth et son pote vers le lac. tu t’ennuyais chez toi, et t’avais fini tes devoirs. et avec tout le bruit à la maison avec les jumeaux, t’avais juste envie de respirer. et t’étais curieux, de ce qu’ils faisaient les deux. t’entendais pas ce qu’ils disaient, alors tu t’es rapproché. et puis y’a eu un bruit, et puis tu es tombé. l’eau glacé sur tes vêtements, t’es pris de court. t’es sous l’eau, tu peux plus respirer, tu te débats mais tu sombres. l’impression d’étouffer, tu paniques. t’avais pas prévu de crever comme ça, pas si tôt. l’envie de pleurer, l’envie de lutter encore un peu mais tout va trop vite. tu vois encore la lumière là haut alors tu te débas, encore et encore. un coup de bras, t’as besoin d’air. un coup de pieds, l’eau rentre dans tes poumons. ça t’oppresse la poitrine, c’est douloureux.
la pire des morts. c’est étrangement lent, pourquoi t’arrives à souffrir aussi longtemps ? t’as envie d’abandonner maintenant, t’y arriveras pas. c’est trop tard mais tu continues à souffrir. pourquoi dans les films les gens ferment doucement les yeux sans souffrir et se laisse divaguer au loin ? et puis une force te fait remonter vers le haut. tu tousses, tu tousses. de l’eau, de l’eau, du sang. t’ouvres les yeux, c’est le pote de ton frère qui te tient entre ses bras. ton frère est encore à une dizaine de mètre, il te regarde mais c’est vide.
plus jamais t’iras dans l’eau.
i
izarra liqueur douce qui coule au fond de ta gorge. c’est forcement bon, c’est des herbes, y’a rien de grave qui peut se produire, non ? t’es l’homme de la soirée, t’es celui qu’on invite si on veut avoir une ambiance. t’es toujours là, à raconter des histoires, la bouteille à la main, le joint à la bouche. si plus tard, t’as rien fait, tu pourras toujours te vanter que la magie des meilleurs soirées de ton quartier, c’était toi.
a
après t'as quatre pattes, une truffes, deux oreilles pointues. tu te repères en reniflant le sol. les bruits te font peur, le moindre mouvement te donnes envie de courir après. tu t'énerves pour des choses qui ne te faisait rien avant. tu cours bizarrement, tu trottes, tu galopes. toi qui aimait les gens, tu les évites. quant t'es triste, tu pleures plus, tu couines. t'es petit maintenant, t'es affreusement petit. tu te sens inutiles et t'as peur, peur de ce qui t'arrives, peur de ce qui va se passer. peur d'être pris pour un chien dans la rue.
peur de finir par devenir complètement un chien, et oublier qui tu es.
r
racisme ordinaire, plus ou moins ordinaire. on va pas se mentir les usa dans les années 80, c'est pas les usa du fun et du love quand t'as des origines, quand t'es pas blanc. y'a vingt ans, certains états bannissait encore le mariage "inter-raciale", dix ans après, nixon traitait les noirs de singe. non, c'est pas forcément la meilleure époque pour ne pas être blanc comme la neige. le sourire figé dans la famille, on a l'habitude des remarques, on a l'habitude de la bêtise. tu subis, mais parfois t'as juste envie de mordre (oups).
i
igloo la neige, t’en es fou, t’adore ça, depuis que t’es petit. t’étais le gamin fou enervé dés qu’il y avait un centimètre de neige par terre. tu sautais dans tout les sens, et si on allait quand même en cours, ça te gênait pas. la neige, son odeur, tout te rendait heureux. t’étais le premier dehors, avec ta veste pour te rouler dedans. t’as pas d’objectif particulier mais t’es là et tu vis ta meilleure vie. aujourd’hui, ça a pas changé, t’es incapable de te concentrer quand il neige dehors et t’as le plus beau des sourires quand tu peux sortir et genre… juste marcher dans la neige. c’est tellement léger.
s
secret ah ça, t'es dans la merde maintenant. un secret, t'en as un. t'en avais plein de petit avant, ton orientation sexuel, tes cachettes à la maison d'herbe, le fait que t'ais envie de rien, tu le cachais déjà. mais te transformer en chien, ça, c'est pas un petit secret. et pas hyper pratique pour se cacher quand d'un coup vous pouvez devenir un animal à tout moment. bonne chance.