goin' to the chapel of love - Bharati (tara) Yadav

An almost sweat childhood : C'était une fille unique, le cadre était idyllique et ses parents avaient des boulots bien payés. Karun Yadav, son père, travaillait en tant que sous-directeur dans une entreprise de voiture, un des plus grands marchés qui avait plaçait Ludhiana comme la ville la plus influente du comté.

Et sa mère, Yaamini Yadav, était une fonctionnaire haut placée à la "United Bank of India". Tout ça pour dire, que Bharati était partie avec toutes les chances de son côté. Il ne lui manquait plus que la bonne personnalité pour tout exploser. Mais le fait est qu'elle était trop occupée à vouloir impressionner son père pour faire attention à qui que ce soit. C'était l'une de ces enfants bizarres, qui ne parlait pas et qui pleurait dès qu'elle sentait une once de violence à son encontre. Ses difficultés pour s'intégrer ont toujours été présentes, mais pour sa mère ce n'était pas grave, il n'y avait que les bonnes notes qui étaient importantes.

Ses parents n'étaient pas les plus agréables : c'était à se demander si le fait qu'elle existait avait changé quoique soit dans les habitudes de son père. Et sa mère semblait l'aimer à travers toutes les remarques qu'elle lui faisait. "Habille-toi mieux", "Ne mâche jamais tes mots", Bharati aimait se dire que c'était pour son bien.

What a context to be alive :  Son père ressassait tous les jours la chance de Bharati. En effet, si cette dernière était née huit ans plus tôt, elle serait venue au monde dans une colonie britannique. Karun Yadav adorait aussi déclamer contre les musulmans, foutre l'angoisse à sa femme et sa fille et déblatérer sur cette "vermine" qui attendrait le premier signe de faiblesse pour faire agrandir leur territoire. "Si ça se trouve dans dix ans tout Punjhab sera sous le joug des musulmans !"

Autant dire que la première guerre indo-pakistanaise avait laissé des peurs. Son père se plaignait du danger qui les guettait, des prochains conflits à venir, surtout dans le contexte de la guerre froide. Mais en grandissant, Bharati se disait que c'était un lâche, ce n'est pas comme s'il avait participé à la guerre de 39-45, à l'inverse de son oncle qui en était revenu brûlé, que ce soit au niveau de la peau ou du mental. Toutes les tensions politiques échappaient à Bharati, mais elle sentait malgré tout ce goût à la survie, la satisfaction d'être libre, et surtout : la chance d'être née dans une bonne famille.  

My love, she keeps warm : Shabana. "Jeune dame". Une perle. Elle était trop belle pour être vraie. Lorsqu'elle avait quinze ans, Bharati n'avait pas des allures de tomboy, elle était juste négligée. On la comparait toujours à un garçon, mais cela ne la dérangeait pas tellement. Ce qui la dérangeait, était le caractère dénigrant caché derrière ces insultes. Elle était fun, avait du répondant lorsqu'elle ne connaissait pas la personne, mais elle restait invisible. La bonne copine qu'on respectait une fois sur deux. Elle était loin d'être prête à voir sa vie chamboulée par une seule personne.

"Shabana Solanki" avait nommée l'institutrice. Après tout, il a fallu une matinée obscure pour qu'une nouvelle dans l'école vienne tout illuminer. Elle était rapidement devenue la plus populaire de sa promo. Sa beauté y était pour beaucoup. Dès que Bharati la vit pour la première fois, elle la détesta. Un mélange de jalousie et de mépris, qui se transforma en admiration en voyant les intérêts et la perspicacité de Shabana.

Il a suffit d'une soirée.. La première soirée à la quelle Bharati était invitée. Les bières brillaient comme des diamants, et elle a dû en boire trois pour se détendre. Les conversations étaient de vives voix, mais elle ne se souvint de rien, ni des gens présents, ni de la demeure en entier. Juste de la chambre en question.. Shabana l'avait chopée entre quatre yeux pendant que Bharati se rafraîchissait au goulot. Elles se mirent à discuter, le plus naturellement possible. Elle ne se souvint même plus des sujets, juste du fait qu'elles se parlaient comme si elles s'étaient toujours connues. Les conversations s'enchaînèrent tellement rapidement qu'elles s'isolèrent de bon train, avec plusieurs bières, comme des fugitives.

Bharati était sur un petit nuage : elle ne s'était jamais sentie aussi vivante et stimulée dans toute sa vie. Plus elle buvait, plus Shabana lui paraissait resplendissante. C'était la personne la plus magnifique qu'elle ait jamais croisée dans toute sa vie. Elle était bouleversée. Trop d'ailleurs, elle ne comprit pas le sentiment qui l'abritait. C'était comme si elle vivait quelque chose d'illégal mais de terriblement excitant, qui défiait tout l'ordre établi. Elle se souvint juste que cela lui donnait envie de pleurer sur le moment car elle était persuadée d'être seule dans son ressenti.

Et pourtant.. Sans qu'elle ne le vit venir, Shabana lui demanda si elle pouvait essayer quelque chose. La gorge nouée, Bharati sortit tant bien que mal un "oui" de sa bouche. La Belle se rapprocha de Timide, de plus en plus, beaucoup trop même. Plus que les règles pouvaient l'autoriser dans son inconscience. Son coeur rata un bond, et les lèvres de Shabana effleura les siennes avant de s'y poser de manière confiante mais légère. La sérotonine explosa, et Bharati étouffa des larmes de bonheur, se disant que c'était un rêve beaucoup trop beau. Son amygdale était en pleine alarme, et elle perdit pied.

C'est à ce moment qu'elle a su qu'elle était sienne, et ce à jamais, son libre-arbitre était fini.

American Dream, I'm coming to get you : Ce jour-là elle a su qu'elle existait aux yeux de son père. Elle voyait sa future vie en Inde comme une succession de bonnes actions pour satisfaire sa mère. C'était sa dernière année et elle a été prise dans l'école de médecine de sa ville, une des plus réputées du Pays. Pas de grand changement qui s'accompagnait, mais ça ne la gênait pas car Shabana allait aussi rester à Ludhiana, pour l'université d'agriculture. Elles étaient déjà un vieux couple même si personne était au courant. Si tout se passait bien, dans cinq ans elles vivraient ensembles et auraient un jardin aménagé avec une fontaine. Cinq ans à attendre avant le bonheur total...

Puis son père débarqua et lui annonça qu'il avait réussi à lui garantir une place à une université américaine.. Il lui avait annoncé à un repas, déclarant que dans deux mois elle devrait faire ses valises pour partir dans le Minnesota. Elle s'étouffa avec son verre d'eau sur le moment.

La suite après ces paroles fut floue, avec le recul Bharati sut que c'était à cause d'un choc émotionnel. Elle se souvint juste être très en colère et avoir tenté de trouver des idées pour négocier mais rien ne pouvait expliquer le choix de rester en Inde, surtout si c'était pour une amoureuse dont les parents ne se doutaient même pas de l'existence. La résiliation remplaça le bonheur du départ. Elle avait promis à Shabana de revenir, et elle avait demandé à ce que cette dernière l'attende. Leur secret était partagé, leur amour semblait éternel.

Puis la veille du départ de Bharati, après une dernière soirée inoubliable à boire et se balader dans les quartiers riches, Shabana lui informa de ses inquiétudes. Lui disant que les relations à distance ne tenaient jamais, et qu'elle l'aimait beaucoup trop pour qu'elle reste célibataire pendant tout ce temps. Et c'est ainsi que leur relation se finit.

Le lendemain dans l'avion, Bharati se sentait à la fois excitée mais terriblement meurtrie, comme si elle avait perdue une partie d'elle en Inde. Même si Shabana avait réussi à la convaincre de la rationalité de cette rupture, son coeur était brisé. Mais elle se disait que c'était pas grave, que ça allait être un chagrin d'amour qui allait durer puis le temps fera les choses, comme tout événement douloureux.

Mais ce qu'elle ne réalisait pas encore, c'est qu'aucune américaine, aucune expérience occidentale, rien n'allait la faire s'en remettre. Il n'y avait que les drogues pour lui faire revivre son ancien bonheur, et c'était ça le plus triste dans ce soit-disant rêve américain..

She was saving lives until... Des années d'université à Minnesota, des années d'errance dans l'ecsta et la coke jusqu'à que le but se dessine enfin. Bharati avait réussi à trouver un travail à l'hôpital de Minneapolis, ses années de médecine lui avaient permis d'être ambulancière. Bien sûr elle n'avait toujours pas arrêté les drogues. Du moment qu'elle sauvait des vies, elle se donnait bien le droit de détruire la sienne.

Tout se passait bien, elle s'était même fait amie avec un collègue nommé Baxter, c'était pas totalement un mauvais boug. De toute façon, Bharati avait très bien dilué sa notion de bien et de mal dès le moment où elle s'était habituée aux moeurs américaines, enfin.. Surtout aux moeurs des futurs médecins. Même si c'était les sauveurs de demain, plein d'événements fucked-up se passaient et des personnes qu'elle aurait méprisées par le passé, sont devenues aussi humaines à ses yeux que Ghandi semblait l'être aux yeux de son peuple. Quand tu évoluais dans un milieu où tout le monde se prenait pour Dieu, il ne fallait pas s'attendre à beaucoup de remises en question de la part du corps médical.

Néanmoins, même si Baxter semblait être le plus fucked-up en terme de dommages cérébraux, il respectait Bharati dans son intégrité humaine. C'était triste, mais au fur et à mesure des années, ça lui avait manquée qu'on la voit plus que par son apparence. C'était la folie en tout cas. Ils se défonçaient ensemble au moins une fois toutes les deux semaines, et tout roulait pour le mieux. Le chèque du fin de mois était là, les collègues n'étaient pas des plus désagréables, Bharati pensait enfin se faire une place définitive.

Mais évidemment, le tableau n'était pas tout rose. Pour elle, son supérieur méritait d'être un cul-de-jatte qui ramperait pour mendier dans les rues de New Delhi.. Elle n'avait jamais eu autant de haine envers quelqu'un, elle n'avait jamais souhaité autant le malheur pour une seule personne. Elle espérait arriver à trouver la paix intérieure pour son propre bien, mais rien que le souvenir de son premier jour lui faisait exploser de rage.

C'était quand même lui qui l'avait incitée à trouver un prénom beaucoup plus blanc sous menace de faire d'elle une paria, dès son premier jour, dès le moment où il lui avait dit qu'elle avait le job. Il l'aimait l'appeler Susan car d'après lui, sa tête "rachitique" lui rappelait la SDF qui traînait avec son cadi rempli de sacs poubelles empestant son quartier d'enfance. Selon lui, c'était pas très différent de l'odeur des épices dans les restaurant indiens. Au bout d'une semaine, elle s'était creusée les méninges pour trouver "Tara", un nom que portait sa professeure préférée en deuxième année. C'était beaucoup plus joli et agréable même si elle sentait trahir toute son identité. Mais tant pis, car ce n'était pas le pire.

Le plus mauvais moment passé était lorsqu'elle s'était faite virer. Ce jour-là, son supérieur s'était enfin permis de lâcher les insultes cachées depuis elle ne savait combien de temps dans son esprit. Elle pensait le mériter en vrai. Elle s'en voulait encore de ce... Passons. Mais l'idée qu'elle ait été la seule à prendre le blâme, l'avait grandement chamboulée. Après tout, si le patient était mort, c'était à cause de l'erreur de procédure de Baxter. C'était lui qui avait pris les mesures face au patient qui convulsait, elle n'avait suivi que les ordres de ce dernier. Certes, elle se serait sans doute rendue compte de sa connerie si son corps ne travaillait pas activement à éliminer l'amas de coke considérable de son organisme. C'était une soirée beaucoup trop arrosée... Mais le fait est qu'elle n'était pas la seule face à ce désastre, et pourtant toute la responsabilité de cet acte lui était retombée dessus.

Même Baxter qui d'habitude n'en avait rien à foutre, s'était rendu compte de la chance qu'il avait de ne pas se faire virer, et de l'injustice commise par son boss. Par la suite, la vie de Bharati ne ressemblait qu'à un fil décousu venant d'une robe de soirée. Cela aurait donné un très beau résultat si cela avait tenu les différents tissus de son destin.